2035, c’est la date fatidique décidée en cette fin octobre par les instances européennes afin de stopper totalement la vente de voitures thermiques sur le vieux continent. Du côté politique, on se félicite évidemment de cette décision qui devrait avoir un impact considérable sur les émissions de CO2 (25 % environ du mix annuel). Cela dit, en coulisse, de plus en plus d’observateurs s’inquiètent. Car une période d’à peine 13 ans pour réaliser cette transition relève d’une véritable gageure.
Interrogé par le journal économique L’Écho, Patrick Hendrick, ingénieur à l’ULB, fait partie des inquiets, car, selon lui, il faut tout repenser : villes, campagnes et zonings. Et tout cela ne se fera pas d’un claquement de doigts…
Selon Patrick Hendrick, nous ne sommes absolument pas prêts à adopter la voiture électrique. Et il indique même à nos confrères que le problème est « énorme et totalement sous-estimé », car, dit-il, il faut des usines à batteries, de l’électricité, des bornes, des places de parking. L’ingénieur et professeur à l’école polytechnique de l’ULB indique en outre qu’il faut tout repenser et qu’en une dizaine d’années, c’est plus que très court.
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La voiture électrique, mais à quel prix ?
Bien entendu, le prix reste l’un des principaux freins à la voiture électrique. Pour que celui-ci baisse, il faudrait passer à une production à grande échelle, mais qui nécessite aussi certains préalables. En effet, la production de lithium devrait être multipliée par 15 (!) d’ici à 2035 et il faudrait aussi éviter certaines substances comme le cobalt et privilégier les technologies comme le lithium-fer-phosphate (LFP).
En cela, il serait temps que l’Europe se réveille et exploite, elle aussi, les ressources dont elle dispose plutôt que de rester dans une situation de dépendance par rapport à la Chine, l’Australie ou l’Amérique du Sud. Actuellement, une seule usine de production de lithium est en activité. Elle se situe au Portugal et sera bientôt rejointe par l’usine du groupe Imerys en France. Il indique que pour éviter la dépendance, ce ne sont pas quelques usines de production ou de raffinage de lithium qu’il faut en Europe, mais bien des centaines.
Changer de paradigme
Patrick Hendrick pointe aussi les constructeurs du doigt, arguant que la taille souvent imposante des voitures électriques participe à leur prix élevé. Il y a donc un défi à relever en concevant des voitures plus petites voitures dotées de plus petites batteries.
Du côté du consommateur, c’est surtout le problème de la recharge qui se pose pour éviter les embouteillages et les abus – les conducteurs qui laissent leur véhicule à borne des heures, alors qu’il est déjà rechargé. Autre point d’attention : le nombre nettement insuffisant de bornes, particulièrement à Bruxelles et en Wallonie. Pour ce technicien, il faut installer des points de recharge de manière plus systématique, et ce en analysant les besoins. Et ça, c’est le rôle – non assumé jusqu’ici – des pouvoirs publics qui doivent inciter le privé à faire des investissements.
Le problème du réseau
D’autres questions se posent, comme celle de puissance du réseau. Pour recharger beaucoup, il faut en effet beaucoup de puissance, notamment dans les entreprises. En outre, la question des saisons se pose chez nous. En effet, en janvier et en février par exemple les panneaux photovoltaïques fonctionnent en général peu, ce qui risque aussi de coincer, surtout chez les citadins qui vont devoir laisser leur voiture plus longtemps en charge alors que tout le voisinage sera dans le besoin (de recharger aussi). Pour ce spécialiste, toutes ces contraintes sont actuellement sous-estimées.
De ce fait, l’ingénieur préconise aussi de donner plus de place à la voiture à hydrogène, car ils offrent des autonomies très intéressantes et ne nécessitent pas de mobiliser le réseau pour faire le plein. Il faudrait juste que leur prix baisse…
Que retenir de tout ceci ? Que, pour ceux qui s’intéressent un tant soit peu à la voiture électrique, ce sont des évidences qui ont été maintes fois relevées. Et c’est bien là que le bât blesse. Car, jusqu’ici, trop peu d’initiatives sont prises pour assurer cette transition, que ce soit pour les matières premières, la production d’électricité – avec de géniales centrales au gaz ? –, la recharge et la puissance du réseau. Or, comme le dit très bien Patrick Hendrick, une dizaine d’années, c’est très court. Trop manifestement pour nos décideurs qui, semble-t-il, sont les seuls à ne pas se rendre compte de ces évidences. C’est, hélas, un constat récurrent que l’on peut (doit) dresser.
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