Dans les pays occidentaux comme en Chine, la course à la voiture électrique est lancée. Pour des raisons climatiques et de pollution des villes, les autorités ont décidé que la voiture électrique devait être imposée à tous les citoyens de leur territoire et que les voitures thermiques devaient disparaître le plus rapidement possible. Cette transition accélérée pose toutefois encore pas mal de problèmes en termes d’accessibilité financière à cette technologie, aux ressources utilisées, à la production d’électricité, à la robustesse du réseau, etc.
C’est dans ce contexte tourmenté que Laurent Castaignède, un ingénieur français spécialisé dans l’analyse de l’impact environnemental du transport, a publié un livre intitulé « La ruée vers la voiture électrique – Entre miracle et désastre ». L’homme a été interrogé par Le Soir et il estime qu’il faut éviter que les promesses technologiques débouchent sur un désastre.
La propreté « fallacieuse » ?
Laurent Castaignède fait d’abord un constat : les voitures électriques ne sont pas très différentes des thermiques et elles proposent encore et toujours des batteries de plus en plus imposantes. Sauf qu’il s’agit d’une fausse bonne idée, car cette course à l’empilement des kWh risque bien de détruire le principal argument de la voiture électrique : sa propreté.
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Car il n’aura échappé à personne que nos voitures sont de plus en plus lourdes : elles sont de plus en plus grandes, dotées de plus en plus grosses batteries et de plus en plus équipées. Et cette réalité n’est plus qu’américaine : en Europe aussi, les SUV sont devenus la race de véhicule la plus vendue alors qu’en général, ils ne rendent pas plus ou mieux de services que les carrosseries traditionnelles, mieux profilées et plus légères. Ramenée à la voiture électrique cette tendance nécessite toujours plus de ressources, ce qui va totalement à l’encontre de la sobriété prônée actuellement à tous les niveaux (alimentaire, vêtement, consommation de produits électroniques, etc.).
Des ressources finies
L’une des préoccupations de Laurent Castaignède a trait aux ressources qui sont par essence finies. Il pense en effet que l’on est entré dans une logique de gaspillage, car il n’y a pas que les voitures qui ont besoin des minerais pour les batteries : il y a tous les appareils électroniques, mais aussi les deux roues, les utilitaires, certains poids lourds, etc. Dès lors proposer des batteries permettant une autonomie de 800 km est un non-sens, d’autant que le besoin n’est pas de parcourir 800 km sur une seule charge. Il s’agit juste de confort et de tranquillité mentale.
En outre, il faut aussi comprendre rappelle l’auteur que nos pays sont dans une situation de dépendance. Surtout vis-à-vis de la Chine qui a choisi il y a 15 ans déjà la voiture électrique, mais moins pour un problème de réchauffement climatique que pour un problème de pollution atmosphérique dans ses grandes villes. Par ailleurs, l’empire du Milieu ambitionnait d’attaquer commercialement les marchés automobiles occidentaux, ce qu’il peut faire avec ses voitures électriques aujourd’hui. Cette transition, la Chine l’a opéré à coup d’énormes subsides qui font que les constructeurs nationaux contrôlent aujourd’hui toute la chaîne de valeur du produit, de l’extraction du minerai, en passant par son raffinage et la construction des batteries. La Chine est donc incontournable. Ce qui met l’Europe dans l’embarras, car on n’ouvre pas des mines du jour au lendemain. La Chine a donc tous les atouts dans son jeu et les constructeurs occidentaux presque plus aucun.
L’electricgate guette
Laurent Castaignède souligne également que le poids élevé des voitures électriques et la nécessité de la déployer à grande échelle risquent aussi de faire exploser les émissions de CO2. Pourquoi, alors que c’est l’effet inverse qui est recherché ? C’est le fait d’une transition trop lente vers les énergies décarbonées. De ce fait, le passage à la voiture électrique ne fait aujourd’hui d’augmenter les consommations issues de sources non renouvelables. L’unique sens de la voiture électrique, c’est qu’elle soit nourrie à l’électricité verte, ce qui est loin d’être le cas.
Dans ce contexte pas très folichon, avouons-le, Laurent Castaignède indique donc que si les pouvoirs publics ne prennent pas des mesures drastiques pour limiter la taille, le poids et les batteries des voitures électriques ainsi que pour la production d’électricité, la société filera tout droit vers un electricgate, un peu à la manière de ce qui s’est passé pour le Dieselgate en 2015 et qui avait mené à une grosse réorientation du marché et des technologies. Pour éviter cette crise, il faudrait donc plus de clairvoyance de la part des acteurs, mais aussi des consommateurs. À méditer…
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