Une ville sans voiture est-elle vraiment envisageable ?

Nombreux sont les politiciens qui rêvent d’une ville sans voiture. Et, progressivement, ceux-ci y parviennent, notamment en élargissant et en durcissant les zones de basses émissions. Mais une ville sans automobile est-elle vraiment envisageable ? A priori, rien n’est impossible, mais l’absence totale d’automobile pourrait poser bien des problèmes, quoi qu’on en pense.

Publié le 8 mars 2024
Temps de lecture : 6 min

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Une ville sans voiture est-elle vraiment envisageable ?

À la veille des élections, la mobilité reste un sujet bien ancré au café du commerce. La thématique est d’autant plus centrale que la société est à un point de basculement avec la transition vers la voiture électrique. Toujours beaucoup trop chère, cette dernière peine à convaincre les consommateurs qui ne savent plus que faire : racheter une voiture thermique, une hybride ou une hybride rechargeable ou alors continuer à rouler avec la leur ? Enfin, tant qu’ils le peuvent encore puisqu’au fil des ans, les zones de basses émissions étendent leurs droits et les véhicules plus anciens en sont toujours plus bannis.

Et justement : d’ici le début 2025, ce sont à nouveau plusieurs milliers de véhicules qui seront bannis de la région bruxelloise (toutes les voitures Diesel Euro 5 et essence Euro 2), mais aussi en Wallonie, du moins en théorie si le principe souvent retardé de la grande LEZ est mis en place.

Cette politique montre que les autorités continuent de travailler à l’élimination des voitures des centres-ville. Comme le rappelai Sud Info il y a quelques jours, de nombreux gestionnaires communaux adhèrent au programme STOP, un acronyme en néerlandais et qui signifie Stappers (piétons), Trappers (cyclistes), Openbaar (transport public ou partagé) et Privaat (Privé). Les villes veulent privilégier les déplacements collectifs et elles ne misent même plus sur la voiture électrique qui est de plus en plus dans le viseur des autorités. Il suffit de voir comment Paris taxera les voitures lourdes dès la rentrée prochaine.

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Des villes sans voiture ?

Dans ce contexte, les citoyens qui ne peuvent acquérir une nouvelle voiture qui rentre dans les clous n’ont d’autre choix que d’abandonner définitivement ce moyen de transport. Est-il d’ailleurs possible qu’à terme les villes soient complètement débarrassées des voitures ? Certains le prônent ou presque. Chez Groen (et Ecolo) par exemple, il faut réduire fortement la place de la voiture dans les villes, mais sans s’en débarrasser totalement comme l’a expliqué Elke van den Brandt, ministre bruxelloise de la Mobilité à nos confrères de la DH. Dans la vision Groen/Ecolo, les automobiles ne doivent plus servir qu’aux déplacements « extrêmement nécessaires ». Le programme de Groen/Ecolo est d’ailleurs très clair : il prévoit de poursuivre le développement de l’offre de transports en commun pour que ceux-ci constituent une alternative efficace et désirable face à la voiture individuelle. Dans ce cadre, pour un environnement apaisé et plus sûr, il faut réduire la place de la voiture individuelle.

Ce qui est surprenant, c’est que Groen/Ecolo souhaite que ce modèle sans presque aucune voiture s’applique aussi aux services d’urgence. Ainsi, le parti préconise de privilégier dès que possible les patrouilles policières à vélo ou à pied plutôt qu’en voiture. En clair, seules les vraies urgences (santé) ou les vrais besoins (déménagements, etc.) devraient permettre l’utilisation d’un véhicule. Réaliste ? La réponse semble évidente…

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Utopie ?

Une ville sans voiture n’est pourtant pas totalement utopique. On peut d’ailleurs le constater au centre de Louvain-La-Neuve ou à Venise. Mais cela s’explique par le fait que ces villes ont été conçues différemment en éliminant de facto l’automobile. Mais ces cas sont rares et la majorité des villes ne se sont pas développées de la sorte.

Interrogée par La DH, une géographe de l’UC Louvain, Isabelle Thomas, explique qu’il est possible de réduire le rôle de la voiture, mais que cela passe nécessairement par une politique qui dope les transports en commun et qui améliorer l’espace dédié aux modes doux. Il faut donc repenser la ville et cesser de fonctionner par microprojets qui n’ont pas de lien les uns entre les autres. Et la géographe d’expliquer que ce changement nécessaire des sommes colossales et plusieurs dizaines d’années de transformation. Change de politique tous les 5 ou 6 ans n’a donc aucun sens et ne peut aboutir qu’à de l’incohérence. Le problème vient aussi de la juxtaposition de solutions de mobilité alternatives qui ne sont parfois complémentaires, mais simplement concurrentes, ce qui n’apporte rien.

Les motos aussi

Mais revenons aux LEZ qui constituent le moyen d’élimination progressif le plus efficace des voitures actuellement et plus particulièrement aux nouvelles règles qui entrent en vigueur à partir de 2025. Concrètement à Bruxelles, ce sont les voitures Diesel Euro 5 et essence Euro 2 seront concernées. Nouveauté : ce sera aussi la toute première fois que l’interdiction visera les motos. Tous les deux roues Diesel seront interdits ainsi que les essence de norme inférieure à l’Euro 3 (type L3-L5). Et ce n’est peut-être pas fini, car la ministre de la Mobilité attend aussi une décision pour les mobylettes et scooters L1 et L2. Ceux fonctionnant au Diesel seraient interdits et ceux fonctionnant à l’essence pourraient encore être autorisés jusqu’en 2027. Verdict en avril 2024.

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Après de nombreux reports pour des raisons administratives, la Wallonie devrait aussi instaurer une grande LEZ à partir de 2025 (interdiction de tous les véhicules Euro 3 et inférieurs). Mais rien n’est moins sûr, car la ministre de l’Environnement, Céline Tellier (Ecolo), a demandé une étude qui montre que les dépassements des valeurs limites européennes en matière de qualité de l’air sont souvent très localisés à l’échelle des rues. La mesure d’interdiction de circulation est donc jugée aujourd’hui disproportionnée et difficilement applicable pour améliorer la qualité de l’air. L’idée est désormais de se tourner vers d’autres dispositifs qui seraient laissés à la libre appréciation des villes et communes en fonction de leur situation, un système qui ne sera donc pas ou très peu lisible ou transparent pour les automobilistes.

La voiture fait partie de notre quotidien, c’est évident. Qu’elle doive être moins polluante et être utilisée dans bien des cas à meilleur escient sont des évidences. Mais de là à adopter une position radicale avec un gouvernement fédéral qui continue d’encourager les voitures de société, ça n’a pas beaucoup de sens. Si ?

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Par David Leclercq Rédacteur automobile

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