Les marges des constructeurs en nette hausse avec la crise

Selon le cabinet de conseil AlixPartners, les marges bénéficiaires de constructeurs auraient nettement augmenté ces derniers mois alors que la crise et les pénuries frappent. Explications.

Publié le 29 juin 2022
Temps de lecture : 4 min

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Les marges des constructeurs en nette hausse avec la crise

Le Global Automotive Outlook du consultant et cabinet de conseils AlixPartners, c’est une sorte de bible annuelle qui fait état de tout le secteur automobile. Autant dire que, chaque année, le document est très attendu par les professionnels, car il livre une analyse pointue. L’édition 2022 ne fait bien sûr pas exception.

Le document délivré par AlixPartners s’attarde évidemment sur le contexte dans lequel évolue le secteur automobile et il traite donc amplement des matières premières qui interviennent dans la fabrication et qui, pour nombre d’entre elles, sont en situation de pénurie. Le rapport souligne en particulier l’augmentation des prix depuis ans et il indique que pour la majeure partie des matières premières ces tarifs ont doublé par rapport à la période pré-Covid.

Le cabinet s’emploie même à illustrer cette hausse des coûts : en mai 2022, le coût des matières premières pour une voiture thermique en Europe s’élevait à 2.827 dollars contre… 1.475 dollars en 2020. Évidemment, les véhicules électriques, plus gourmands en matières premières en raison de leur batterie principalement, souffrent encore plus de cette situation. Elle est passée de 2.924 dollars en 2020 à 6.533 dollars en 2022. Faites le compte : la hausse dépasse les 120% !

Pas de sortie du tunnel en vue

AlixPartners n’est pas positif non plus pour ce qui touche aux chaînes d’approvisionnement. Les pénuries de semi-conducteurs ou de bottes de câbles par exemple pourraient encore s’accentuer dans les mois qui viennent, prévient le cabinet. En raison de « facteurs structurels ». Pour les experts d’AlixPartners, les nouvelles capacités de production ne correspondent pas forcément aux besoins de l’industrie automobile.

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En effet, on oublie souvent que la demande pour les semi-conducteurs va continuer à croître dans les mois et années qui viennent, car il en faut trois fois plus pour construire une voiture électrique que pour une voiture thermique. Le cabinet s’attend d’ailleurs à ce que la demande du secteur automobile augmente de 10% par an, un volume qui manifestement ne sera pas soutenable. De ce fait, les constructeurs seraient encore obligés d’arrêter régulièrement leurs chaînes de production, faute de composants. Voilà qui n’est pas de nature à calmer le marché et à entamer les descentes de prix pourtant espérées par les consommateurs pour les voitures électriques.

Ces nouvelles ruptures dans les chaînes d’approvisionnement ne permettront pas au marché de retrouver son niveau et donc le nombre d’immatriculations espéré. AlixPartners estime d’ailleurs que le marché sera encore baissier en 2022 avec une projection de 79 millions de voitures vendues dans le monde, contre 90 millions d’unités en 2019. En Belgique, on devrait donc stagner autour des 350.000 voitures par an, loin des records enregistrés ces dernières années (jusque 550.000 voitures).

De plus grosses marges pour les constructeurs

Paradoxe de cette situation : les marges des constructeurs, c’est-à-dire leurs bénéfices par voiture vendue, seraient en forte hausse selon le cabinet-conseil. « Le déséquilibre entre l’offre et la demande a permis à l’industrie automobile de réaliser des marges exceptionnelles, entraînant ainsi une création de valeur importante pour le secteur, qui est devenu bien plus attractif pour les investisseurs » peut-on lire dans le Global Automotive Outlook.

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De ce fait, la valorisation du secteur pourrait doubler d’ici 2023, à 89,2 milliards de dollars. Il se trouve que les constructeurs sont capables plus que de nombreux autres secteurs de répercuter les hausses de leurs coûts directement sur le consommateur, ce qui implique qu’ils peuvent alors augmenter leur EBITDA (« Earnings Before Interest, Taxes, Depreciation and Amortization », en français « Bénéfice avant Intérêts, Impôts, Dépréciation et Amortissement ») de 3,2 %, contre 1,7 % pour les fournisseurs, indique encore AlixPartners.

Le cabinet-conseil New-Yorkais dresse aussi quelques prévisions sur l’évolution du marché, notamment avec l’obligation de la voiture électrique (neuve) à partir de 2035 en Europe. Selon AlixPartners, la voiture électrique deviendra majoritaire à cette échéance dans toutes les grandes régions du monde : elle devrait compter pour 85 % de véhicules en Europe, 62% en Amérique du Nord et 64% en Chine. La transition est donc inéluctable, mais elle coûtera aussi cher relève le cabinet qui a pris sa calculette et l’évalue à 70 milliards de dollars d’ici 2030, une somme que les constructeurs pourraient toutefois ne pas devoir débourser en adoptant une gestion active de la transition qui pourrait leur permettre d’économiser 40 à 60 %.

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Par David Leclercq Rédacteur automobile

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