Le permis de conduire à points, la Belgique en parle depuis 30 ans. Car les discussions et les premiers accords autour de ce type de permis remontent à l’époque de Jean-Luc Dehaene alors Premier ministre. Depuis, le dossier ressort régulièrement (fin des années 1990, 2005, 2014, 2018, jusqu’ au dernier gouvernement. Manifestement, le prochain gouvernement s’en saisit déjà puisque le point figure dans les notes d’accord de Bart De Wever (N-VA).
Et cette fois, on serait tenté de dire que ce n’est pas pour du beurre, car les autorités sont aussi tenaillées par le besoin de faire progresser les chiffres de la sécurité routière puisque l’objectif est fixé à zéro tué sur la route à l’horizon 2050. En outre, la pression européenne se fait aussi de plus en plus forte alors que 22 pays ont déjà adopté ce dispositif.
Pourquoi maintenant ?
On se demande toutefois pourquoi maintenant et pas il y a 5 ans ? En fait, c’est VIAS qui répond à la question. Interrogé par Sud Info, l’Institut indique qu’il y a quelques années, l’introduction de ce système n’était pas prioritaire, car il n’y avait pas assez de contrôles. Maintenant que les forces de l’ordre sont plus présentes sur les routes et que les contrôles radars sont (presque) effectué à chaque coin de rue, les conditions sont réunies pour pouvoir appliquer ce permis à points.
VIAS a toujours défendu le permis à points, notamment à travers trois études dont les conclusions sont évidentes pour l’organisme : ce permis serait le chaînon manquant en matière de sécurité routière en Belgique. Il pourrait sauver entre 50 et 150 vies dès sa première année de mise en application. C’est aussi du simple au triple. VIAS estime que par la suite, tout dépendra des mesures d’accompagnement qui seront prises pour faire respecter le permis à points. On se doute qu’au plus elles seront contraignantes, au plus la peur du policier fera son effet… VIAS estime maintenant que la suite est politique.
Publicité – continuez à lire ci-dessous
Une loi passée et un cadre précis
Et justement : les politiques semblent se saisir du dossier, même anticipativement. Car le groupe Ecolo/Groen vient de déposer à la Chambre une proposition de loi qui modifie les règles du permis à points. En l’occurrence, cette proposition de loi vise à mettre en place un système de lutte contre la récidive. Et il s’agit d’un système plus complet et plus graduel et plus efficient que l’existant qui n’a jamais été mis en application.
Le système proposé ne consiste pas à retirer des points du permis de conduire, mais d’additionner les points négatifs. C’est donc l’inverse du système français. Lorsque le total de 12 points est obtenu, alors le conducteur est déchu de son droit de conduire pour une période de 3 mois. Pour le récupérer, le conducteur devra alors passer un examen de réintégration. Le système prévoit en outre que les récidivistes soient particulièrement visés, car la période de déchéance peut être doublée ou triplée si le total de 12 points est à nouveau atteint dans un certain délai.
Naturellement, il existe une pondération en fonction de la gravité de l’infraction. Elle est reprise dans le tableau ci-dessous. Globalement, l’ajout de points varie entre 2 à 6. Par exemple, un excès de vitesse de moins de 30 km/h hors agglomération sera sanctionné de 2 points, tout comme le stationnement sur une place réservée aux personnes à mobilité réduite. Un excès de vitesse en agglomération coûtera par contre 3 points tandis qu’un dépassement de la vitesse autorisée entre 30 et 40 km/h hors agglomération sera sanctionné de 4 points tout comme une consommation d’alcool comprise entre 0,5 et 0,8 g/km.
Type d’infraction | Points sur le permis |
Excès de vitesse < 20 km/h et ≤ 30 km/h hors agglomération | 2 |
Stationnement sur place pour personnes à mobilité réduite | 2 |
Infractions du 3e degré | 3 |
Excès de vitesse > 20 km/h et ≤ 30 km/h en agglomération | 3 |
Excès de vitesse > 30 km/h et ≤ 40 km/h hors agglomération | 4 |
Alcool > 0,5 g/l et ≤ 0,8 g/l | 4 |
Excès de vitesse > 30 km/h en agglomération | 6 |
Excès de vitesse > 40 km/h hors agglomération | 6 |
Infraction du 4e degré | 6 |
Conduite sans permis | 6 |
Délit de fuite | 6 |
Alcool > 0,8 g/l | 6 |
Ivresse ou état analogue | 6 |
Confier son véhicule à une personne sous influence d’alcool | 6 |
Conduite sous influence de drogue | 6 |
Conduite en cas de retrait effectif du permis | 6 |
Utiliser un détecteur actif de radar | 6 |
Conduire une voiture non assurée | 6 |
Examen de repêchage
On le constate, les pertes peuvent être rapides si on cumule des infractions importantes. Mais le système prévoit aussi une procédure de récupération. Ainsi lorsque le conducteur aura un solde entre 8 et 11 points sur son permis, il aura la possibilité de suivre une formation pour réduire son solde de 4 points.
Tout l’historique des points sera conservé pendant 2 ou 3 ans maximum. Après cette période et s’il n’y a pas eu de nouvelle infraction, le solde de points serait automatiquement ramené à zéro. Mais si la personne, quelle qu’elle soit, remonte ensuite à 12 points, les périodes de retrait seront doublées ou triplées en fonction.
Pas de grosses pertes ?
A priori, l’entrée en vigueur du dispositif ne devrait pas entraîner de grosses pertes de points, comme ça s’est vérifié en France déjà. Les conducteurs se montreront plus vigilants, ce qui est l’objectif du dispositif. Le système est donc prêt et il faudra voir si Bart De Wever parviendra à imposer cette vue à la coalition qu’il tente de construire. C’est un bras de fer politique maintenant qui va se jouer. La Flandre est très favorable à l’instauration du permis à points, ce qui n’est pas le cas de la Wallonie, plus réfractaire et où les fake news circulent. Plus encore : le sud du pays pense automatiquement au système français et pense qu’il sera identique en Belgique, ce qui n’est pas le cas.
La sécurité routière semble d’ailleurs passionner les nouveaux parlementaires issus des dernières élections. Deux députées du CD&V, Tine Gielis et Nawal Farih, viennent en effet de déposer un texte visant à étendre les règles concernant la récidive à certaines infractions, notamment la conduite sous influence d’alcool qui pourrait être sanctionnée d’office par le montage d’un éthylotest antidémarrage, la conduite en dépit d’une déchéance du droit de conduire qui serait sanctionnée avec les mesures anti-alcool ou antidrogue et enfin la mise d’un véhicule à la disposition d’une personne non munie d’un permis de conduire valable qui pourrait mener le propriétaire d’office à une déchéance. Les peines actuellement prononcées pour ces infractions ne sont pas suffisamment prises au sérieux. Il s’agit donc de les alourdir pour que le message passe.
Le permis à points est souvent considéré comme une épée de Damoclès planant au-dessus de la tête des automobilistes. Mais en réalité, ce système ne change rien pour 90% des conducteurs qui respectent globalement les règles. Un petit excès de vitesse ne sera donc pas impactant.
Photos : SPF Mobilité, Politie Gent & zone de Police Nivelles-Genappe
À la recherche d'une voiture ? Cherchez, trouvez et achetez le meilleur modèle sur Gocar.be