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Arai, conception et fabrication (2ème partie)

Banzaï

Pascal Mouton | Publié le 1 mars 2017 | Temps de lecture : 19 min

Surprenant est le premier mot qui me vient à l’esprit lorsque je franchis le seuil du «centre d’inspiration Arai» situé à Hoevelaken (Pays-Bas). Comment imaginer que derrière la porte de ce bâtiment anonyme se trouve des «machines infernales» qu’aucun casque ne souhaiterait rencontrer. Incroyable aussi de contempler les murs de cette véritable salle de torture pour couvre-chef qui sont recouverts de centaines de casques, témoins de l’inexorable ascension du fabricant japonais. Masaki Yamamoto, maitre des lieux, nous accueille chaleureusement. Ce technicien Arai, véritable puits de science sera notre guide pour la journée. A coup de graphiques et d’essais dynamiques, il va nous démontrer l’utilité mais également les limites des normes qui dictent l’homologation d’un casque.

Aïe aïe aïe

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La majorité des motards dont je fais partie pensent à tort que la fonction principale d’un casque est d’amortir au maximum l’énergie d’impact au moment du crash. Un petit rappel de physique cependant nous apprend que l’énergie cinétique s’accroit proportionnellement au carré de la vitesse. En clair, plus un motard va vite plus il possède de l’énergie. Première démonstration au banc d’essai pour illustrer le sujet avec la tête artificielle (qui possède des capteurs tridimensionnels et un accéléromètre) sur laquelle est positionné normalement un casque à tester. Ici l’expérience se fait donc «tête nue» et celle-ci est projetée d’une hauteur de 40 cm sur un plot métallique hémisphérique. Le résultat du test est directement décortiqué via le graphique visible sur l’écran de l’ordinateur raccordé au banc d’essai. Un pic de 424 G (G=quantité d’énergie) est constaté sachant que la limite tolérable (avant lésions graves) est de 300 G et que la norme européenne accepte 275 G, la vitesse à l’impacte est de 2,3 mètres par seconde.

L’Europe

La norme européenne ECE-2205 actuellement en place exige donc que la valeur maximum de décélération ne dépasse pas 275 G tout cela à une vitesse simulée d’impact de 28 km/h! Les points d’impact justement (au nombre de 6) sont fixés invariablement au même endroit pour tous les fabricants. Il n’y a pas de test à la perforation prévu au contraire du test d’enclume (reproduisant la bordure d’un trottoir). Enfin le test ne se fait qu’une seule fois par point d’impact. Toutes ces informations nous sont données avant de nous montrer un casque un peu particulier. En fait un intégral Arai qui a été découpé à certains endroits mais qui passe allègrement les tests de la norme européenne ECE-2205. C’est ce qu’on appelle une démonstration par l’absurde. L’essai suivant est par contre réalisé avec un casque «complet», un modèle RX-7V. Enfilé sur la fameuse tête à capteurs, l’intégral est positionné (au laser) sur l’un des points d’impact établi par la norme ECE-2205. Pour respecter la vitesse d’impact de 28 km/h, le casque est projeté d’une hauteur de 3 mètres. On a mal pour lui, mais le «crâne sensoriel» ne reçoit que 161g en décélération. L’ordinateur nous indique une vitesse de 7,58 m/s et une valeur de 1137 pour le HIC. Ah bon vla autre chose, c’est quoi ce HIC?

Pas possible

Abréviation anglaise pour Head Injury Criteria, le HIC est un indice d’importance des blessures et de leur gravité. La norme maxi tolérable pour ce critère de blessure à la tête est établie à 2400 HIC. L’Europe préconise une valeur HIC la plus faible possible. Lors du premier test à vide avec la «petite» chute de 40 cm, la valeur du HIC atteignait 1785. L’indice HIC est également très important pour ARAI qui préconise par contre (et à l’inverse de l’Europe) un indice HIC élevé. En clair, un impact faible sur une longue durée au lieu d’un choc plus fort mais plus bref. Dans ce cas, la valeur HIC est répartie sur une plus grande durée dans le temps ! Vous aurez certainement compris qu’il est raisonnablement impossible pour un casque d’absorber en une fois toute l’énergie cinétique due au déplacement (donc à la vitesse) d’un motard au moment de l’impact. C’est le nœud du problème et ARAI l’a très bien compris aussi. Pour le fabricant japonais, la solution se trouve dans le glancing-off. Zut ça se complique!

Comme un œuf

Mais pourtant il fallait y penser, glancing-off ou si vous préférez ricocher en français est le cœur de la philosophie ARAI. L’expérience et l’étude de nombreux incidents a conduit le fabricant nippon à une conclusion évidente. Plus l’énergie (à dissiper) est importante, plus le besoin de «ricocher» est important. Le but est de «répartir» sur une plus grande durée l’absorption d’énergie, en faisant plus longtemps «glisser» le casque. Plus on peut éviter d’envoyer de l’énergie dans le casque, plus le casque a de capacité d’absorption en réserve. C’est une évidence pour le japonais qui s’évertue à garder une forme pratiquement identique à tous ses casques depuis tant d’années. Le concept R75 en est la preuve avec une courbe convexe continue d’un rayon minimum de 75 mm sur tout le pourtour supérieur du casque, pratiquement la zone établie par la norme SNELL (voir plus loin). En résumé, une coque extérieure hyper rigide qui résistera le plus longtemps possible à l’abrasion et glissera «facilement» grâce à sa forme ovoïde (d’où l’utilisation exclusive de fibre au détriment du plastique injecté). Un intérieur plus souple dans certaines zones (absorption des chocs) et plus rigide dans d’autres (pour les zones plus faibles comme le contour de la visière par exemple). C’est également pour la même raison qu’ARAI continue d’utiliser ses fameuses plaquettes qui protègent les articulations de visière de tous ses casques.

SNELL plus réaliste

Pour vendre des casques à travers le monde, ARAI doit se plier et répondre aux différentes normes (ECE-2205, DOT, etc …) établies. Mais en interne, le fabricant japonais travaille conjointement avec la norme SNELL. Celle-ci a été crée par une fondation indépendante américaine. Sur le banc d’essai pour le test d’absorption d’impact pas de points précis (souvenez-vous des 6 points pour notre norme européenne) mais une zone assez vaste qui couvre pratique toute la surface supérieure du casque. L’impact peut être reproduit une deuxième fois au même endroit. En plus du test d’enclume (comme pour l’ECE-2205) il existe ici un test de perforation. Une barre pointue en acier de 3 kg est lâchée d’une hauteur de 3 mètres. Masaki a effectué quelques tests sur banc d’essai SNELL avec notre pauvre RX-7V déjà bien « percuté ». Et le bougre a tenu bon, y compris sur des zones d’impact déjà fragilisées précédemment. Le test à l’impact a également été réussi avec brio. Il est logique de penser que la méthode SNELL est plus proche de la réalité que la norme ECE-2205. La norme américaine est par contre plus contraignante pour les fabricants mais plus rassurante pour les utilisateurs.

La conclusion

ARAI est devenu au fil du temps un acteur important pour la protection des motards. Cas unique dans le secteur pour cette société qui a toujours su rester familiale. L’esprit de son créateur Hirotake se perpétue au travers de ses descendants Michio et Akihito ARAI. Passion, qualité et sécurité au service des motards.

ENCARTS

Artisanat et technologie

Tous les casques ARAI sont fabriqués au japon par une main d’œuvre qualifiée. La production est en moyenne de 1500 casques par jour. Il faut compter 18h (sans les temps de séchage) pour construire un casque. Tous le travail est fait à la main sauf la découpe laser de la coque pour l’emplacement de la visière. Quatre structures de coques (suivant le modèle) existent avec un judicieux mélange de fibres (20 pièces) et de résine, mais pas trop. Le moulage manuel réalisé par des mains expertes est chauffé suivant un procédé secret. Un robot découpe ensuite la coque au niveau de la visière. Inspection visuelle et sensoriel pour écarter les coques défaillantes. L’étape suivante étalée sur 7 jours consiste à préparer la coque pour la peinture. Entre ponçage, sous-couche et polissage à la main, 7 étapes manuelles sont nécessaires. Peinture et décoration suivent avant l’étape cruciale de perforation de la coque (pour les aérations). Quelques finitions en caoutchouc avant la très difficile insertion de la doublure EPS (monobloc à densité multiple). Placement de la jugulaire (réservé à quelques ouvriers triés sur le volet). S’ajoute ensuite les diverses ventilations, les mousses de joue et l’écran avant le contrôle final (poids) et l’empaquetage.


Durée de vie d’un casque ARAI

Le fabricant japonais estime entre 5 et 7 ans de durée de vie pour ses casques. On penserait que c’est la coque externe qui se détériore au contact des UV. Mais le problème vient plutôt de la doublure monobloc interne. Constituée de polystyrène à densité multiple (3 zones) qui se détériore au fil du temps.


A chacun sa tête

Ne vous avisez pas d’acquérir un casque ARAI hors Europe. Suivant le marché, il existe trois types de calotin déterminé par la forme générale du crâne. Chez nous c’est le type ovale intermédiaire qui prédomine. En Asie c’est l’ovale et en Amérique on passe à l’ovale long …


Choix techniques raisonnés

Arai persiste dans sa jugulaire à double D. Elle est d’ailleurs obligatoire pour les instances de la F1 ou le fabricant japonais truste pratiquement la moitié du plateau. Pas non plus de casque modulable dans le catalogue. Ce type de casque ne répond pas, pour l’instant, aux critères minimums de sécurité déterminé par ARAI. Il en va de même pour tous les systèmes de pare-soleil intégré qui «déforcent» la coque et la doublure EPS. ARAI utilise pour cette raison un dispositif externe baptisé PRO SHADE. Dernière avancée technologique avec le VAS, un système à axe variable qui commande l’ouverture de la visière. Mais surtout qui déplace l’emplacement du point pivot nécessaire à tout mécanisme d’ouverture. Généralement situé au niveau des tempes, c’est un point névralgique et sensible pour tous les casques.

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