ESSAI RÉTRO Sunbeam Chamois MKII (1967) : l’originalité ne paie pas toujours

Quand un constructeur réputé très traditionnaliste s’aventure sur un nouveau marché avec un produit pour le moins original, les risques sont nombreux. Sunbeam en fait l’amère expérience…

Publié le 13 novembre 2022
Temps de lecture : 7 min

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ESSAI RÉTRO Sunbeam Chamois MKII (1967) : l’originalité ne paie pas toujours

Chez Gocar et Autoclassic, nous aimons les modèles légendaires de l’histoire de l’automobile, mais aussi ceux qui sont méconnus. Aujourd’hui nous allons nous pencher sur l’un d’entre eux : la Sunbeam Chamois MKII. Pour être honnêtes, nous ne souvenions pas vraiment d’en avoir croisé une avant de découvrir la voiture de Laurent, un sympathique passionné qui la connaît parfaitement.

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Pour revenir aux origines de cette voiture, il faut aborder l’histoire du groupe automobile Rootes. Fondée en 1913 dans le Kent, l’entreprise se spécialise dans la vente de véhicules, particuliers et commerciaux. Dans les années 20, les frères Rootes se lancent dans l’acquisition de constructeurs britanniques renommés comme Hillman en 1928 Humber et Commer en 1929/1931.

Ces acquisitions massives se traduisent rapidement par des doublons au sein des différentes marques et il est rapidement décidé de décliner certains modèles de façon plus ou moins luxueuse et d’identifier leur finition ou leur statut avec les différents badges appartenant au groupe : Hillman s’occupe des modèles populaires, Humber construit limousines et les grosses berlines et Sunbeam-Talbot est plus orienté voitures de sport. On peut remarquer la vision prémonitoire du groupe Rootes puisque cette façon de faire a été adoptée par plusieurs groupes automobiles (comme Stellantis, par exemple) aujourd’hui !

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Succès grandissant

Après la guerre, Rootes est propriétaire de Humber, Hillman, Sunbeam, ainsi que des véhicules utilitaires Karrier et Commer. Elle s’occupe également de la distribution des voitures Singer, une firme qu’elle absorbe finalement en 1956.

À cette époque, le groupe qui se place à la 3e position des constructeurs britanniques manque cruellement d’un modèle d’entrée de gamme, accessible au plus grand nombre. C’est ainsi que naît le programme Apex dirigé par l’ingénieur en chef Peter Ware. Celui-ci ose aller à contre-courant des habitudes de Rootes qui produit des véhicules extrêmement classiques en développant une plateforme à moteur arrière, une première au sein de ce groupe ! En pleine crise du Suez en 1956-1957, ce projet prend encore plus d’ampleur lorsque les dirigeants de Rootes ont vent que BMC (British Motor Corporation) prépare de son côté une citadine qui deviendra la Mini.

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Si des solutions techniques comme un bicylindre à air ou l’installation d’un moteur Coventry Climax (utilisé par les premières Lotus entre autres) sont testées, un moteur est finalement développé en interne. Ce 4 cylindres refroidi par eau à arbre à cames en tête a la particularité d’être réalisé entièrement en aluminium, une première pour un véhicule de grande diffusion. D’une cylindrée de 875cc, celui-ci développe 39 ch. Développé sur base du Coventry Climax, il diffère de ce dernier sur plusieurs points comme la culasse qui lui est spécifique. Monté derrière le train arrière, il est incliné à 45° pour un centre de gravité plus bas.

Inspiration américaine

Pour concevoir la carrosserie de qui deviendra l’Hillman Imp ou la Sunbeam Chamois (une dénomination réservée à l’export), les designers de Rootes s’inspirent fortement de la Chevrolet Corvair, une berline moyenne (du moins selon des standards américains) qui adopte également des choix techniques osés comme un moteur 6 cylindres à plat disposé à l’arrière. Pour l’anecdote, cette dernière a mauvaise réputation (fiabilité, sécurité, etc.) dès son lancement en 1960. La ligne de la petite anglaise est donc fort américanisée, surtout à l’arrière. La face avant reçoit une petite calandre factice (dans sa version Sunbeam du moins) puisque toute la mécanique se trouve de l’autre côté !

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A l’époque, la révolution vient du fait que l’Imp/Chamois dispose d’un petit hayon qui donne sur un coffre placé entre la banquette et le compartiment moteur. Mesurant seulement 3,58 m de long et 1,52 m de large, elle se place en termes de dimensions entre une Mini et une VW Coccinelle.

Carrière difficile

Malheureusement, plusieurs éléments ont fait que cette voiture n’a pas été une réussite commerciale. Tout d’abord, elle n’est lancée qu’en 1963, soit 4 ans après la Mini : c’est évidemment beaucoup trop tard car cette dernière a déjà explosé commercialement. Ensuite, pour des raisons politiques, cette voiture est fabriquée en Ecosse, une région alors sinistrée économiquement. La main d’œuvre y est expérimentée et pas forcément motivée, ce qui a des conséquences sur la qualité de finition de la voiture.

Enfin, la Imp/Chamois est plus chère que la Mini mais elle connaît des problèmes de fiabilité, au niveau de son refroidissement notamment. Rootes a mis le paquet avec des équipements d’origine que l’on ne trouve pas à l’époque sur ce genre de voiture comme un starter automatique, une banquette arrière rabattable et une jauge de température, la tension et la pression d’huile.

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Pourtant, les ventes ne décollent pas vraiment malgré le lancement d’une version MKII en 1965 qui abandonnait sa commande d’accélérateur pneumatique et son starter automatique, trop peu fiables. La géométrie de la suspension est également modifiée pour un meilleur comportement. Rootes introduit également de nouvelles variantes de carrosseries comme le break, le van ou le coupé mais rien n’y fait, la voiture se vend mal. Les investissements consentis pour son développement et pour la construction de l’usine impactent fortement les finances du groupe Rootes dont la pérennité est menacée.

Partenaire depuis 1964, Chrysler acquiert finalement la firme après le décès de son patron en 1967. Contre toute attente, la Imp continue sa carrière et l’année suivante, elle fait l’objet d’un nouveau facelift dans sa version MKIII. Devenue plus rationnelle et moins chère malgré l’inflation qui touche la Grande-Bretagne, la voiture poursuit sa carrière jusqu’en 1976, avant de prendre une retraite bien méritée. Seuls 440.032 exemplaires sont construits, un résultat plus que décevant. Deux ans plus tard, Chrysler Europe est à son tour absorbé par Peugeot

So British !

Entre Laurent et sa Sunbeam, l’idylle a débuté en 2008 et ce n’est qu’à quelques kilomètres de chez lui qui a trouvé cette Chamois MKII de 1967 qui avait été vendue neuve en Belgique. Si la voiture présentait assez bien de carrosserie, il n’en était autrement de la mécanique qu’il a patiemment démontée et restaurée. La voiture a ensuite été équipée (phares longue portée, tripmaster, etc.) pour participer à des rallyes de régularité où elle a fait forte impression en raison de sa rareté sous nos latitudes.

Garée devant chez Laurent, la Sunbeam est microscopique en comparaison des voitures moderne qui sont stationnées à-côté ! Comme dans une Mini, on y est assis très bas mais l’impression d’espace est assez étonnante compte-tenu de ses dimensions lilliputiennes.

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La finition est tout aussi impressionnante avec des garnitures en bois qui rappellent que l’on est bien à bord d’une voiture britannique. À cause des passages de roues imposants, la position de conduite est particulière puisque les pieds et les jambes sont rejetés vers la droite, alors que le tronc est face au volant. Pour le reste, les commandes tombent bien sous la main et la direction est assez souple vu que la mécanique se trouve à l’arrière.

Par contre, celle-ci est fort peu insonorisée et à « haute » vitesse (on parle de 100 km/h), l’habitacle fait caisse de résonnance et Laurent nous avoue que la Sunbeam se montre alors fatigante. C’est dommage car les suspensions sont confortables, la tenue de route (sur le sec du moins) n’est pas horrible que l’on pourrait l’imaginer et le moteur fait preuve d’une bonne santé mais s’il est peu coupleux et que les vitesses atteintes sont proches de celles d’un scooter 125cc actuel. Pourtant, les sensations sont au rendez-vous, comme souvent avec les voitures des années 60.

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Par Maxime Hérion Journaliste

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