Tous les automobilistes en ont fait l’expérience : leur voiture consomme toujours plus que ce qui est annoncé par le constructeur. Oubliez donc les 3,5 l/100 km revendiqués et tablez plutôt sur 5 ou 6 l/100 km dans le meilleur des cas. Cette différence s’explique par le fait que les tests sur les moteurs et leur homologation sont réalisés en laboratoires, donc sans vent, sans charge véhicule, sans relief, etc. De ce fait, les procédures sont peu en lien avec les réalités de la conduite quotidienne (embouteillages, freinages, relances, etc.) et les données récoltées à la fin relèvent si pas du fantasque, d’un solide optimisme.
À la suite du Dieselgate (2015), la norme en vigueur, la NEDC qui avait fait l’objet de fraudes, a été pointée du doigt pour son caractère peu réaliste. Et elle a été remplacée par les autorités par la procédure WLTP dès 2017, plus contraignante et donc plus proche de la réalité.
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L’écart se creuse
Depuis, on pensait donc que l’automobiliste serait moins dans l’erreur et que les émissions « théoriques » (ou effectuées en laboratoires) seraient plus proches des émissions et de la consommation réelle des voitures – CO2 et consommation sont toujours intimement liés puisque les émissions sont le résultat d’une combustion, en l’occurrence celle du carburant. Mais ce n’est pas le cas. En effet, une enquête menée par l’ONG International Council on Clean Transportation (ICCT) révèle que « En 2022, les émissions dans le monde réel ont été 14% plus élevées que celles avancées par les groupes automobiles européens, contre 8% en 2018 ». Cela signifie donc que l’écart se creuse, et pas qu’un peu.
Que faut-il en déduire ? Que la norme WLTP est aussi à côté de la plaque ? L’ONG tempère et explique que le cycle WLTP harmonisé au niveau mondial est plus proche de la réalité, car si on avait continué avec la norme NEDC, l’écart aurait alors atteint les 33% ! Il y a donc un mieux, mais, apparemment, les choses sont en train de se gâter…
Quelles données ?
Pour constater le dérapage des émissions de CO2 depuis 2018, les chercheurs de l’ICCT se sont penchés sur les données WLTP des véhicules et ils les ont comparées avec celles collectées via le site Spritmonitor.de de 160.000 automobilistes allemands utilisant exclusivement des voitures thermiques. Il faut noter que toutes les marques allemandes figurent dans l’échantillon, ainsi que Ford et Hyundai. En revanche, aucune marque française ou italienne n’a été examinée. Curieux.
Les spécialistes ont naturellement observé des différences entre les marques. Certaines font mieux et d’autres moins bien. Les marques du groupe Volkswagen dont Audi et la marque BMW affichent une différence de 12% avec la réalité, ce qui est sensiblement moins qu’Opel par exemple qui affiche 21% de différence ou Hyundai avec 20% d’écart. Mercedes se classe parmi les bons élèves (si on peut dire) avec 11% de différence.
L’alerte est lancée
Si l’ICCT publie cette étude, c’est que l’ONG s’inquiète fortement des conséquences de ces différences parfois énormes. En effet, à l’heure où il est urgent de réduire les émissions de CO2, on constate que celles-ci augmentent dans la réalité. Et comme l’automobile et les transports pèsent pour 25% du CO2 émis chaque année…
« Si ce sujet n’est pas traité, ce dérapage des données réelles par rapport au WLTP a de quoi remettre en cause les objectifs de baisse des émissions fixées par l’Union européenne », alerte l’ICCT qui appelle aussi les autorités à prendre en considération les émissions réelles dès 2027 et pas en 2030 comme c’est prévu. À ce moment, toutes les voitures enregistreront leur consommation réelle et les informations seront remontées directement chez les constructeurs.
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