Une mesure de circulation récemment introduite à Buenos Aires, en Argentine, a donné lieu à un débat sur l’inclusion et les droits des conducteurs malentendants. Les véhicules conduits par des sourds ou des malentendants dans la province de Buenos Aires doivent porter un autocollant avec un motif en damier jaune et rouge distinctif. Les autocollants sont apposés à l’arrière et sur les flancs de la voiture. Ce marquage peu subtil est obligatoire et vise à avertir les autres usagers de la route et à les encourager à communiquer avec le conducteur par d’autres moyens, tels que l’utilisation des feux de route.
Stigmatiser ou aider ?
Plutôt que d’étiqueter les gens, la mesure vise à accroître la sécurité routière. Selon les organismes officiels, elle favorise l’inclusion en permettant à un groupe minoritaire de mieux s’intégrer dans un trafic parfois très dense. Mais elle suscite des réactions partagées. En Europe, où il n’existe pas d’obligation similaire, il n’y a pas de consensus sur l’utilité de ces autocollants. Dans des pays comme la France, l’Allemagne et l’Italie, les autocollants sont recommandés mais facultatifs. En Belgique, où il n’y a pas de recommandation pour ces autocollants, cette nouvelle mesure est accueillie avec méfiance. Le Collectif Recherche et Expression (CREE), une organisation belge de jeunes sourds et malentendants, a même qualifié la mesure de stigmatisante dans le journal l’Avenir.
Marie Depré, chargée de communication au CREE, déclare : « L’utilisation d’un tel autocollant pour les conducteurs sourds ressemble à une forme d’étiquetage inutile. La communauté craint qu’elle ne conduise à la discrimination plutôt qu’à la compréhension. Où est la limite ? Devrions-nous bientôt introduire un autocollant pour les personnes âgées, les jeunes ou les personnes souffrant d’autres problèmes de santé tels que le diabète ? »
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Cette critique est partagée par l’institut belge de la circulation Vias, qui décrit la mesure comme une « pratique discriminatoire qui ne contribue pas à la sécurité routière ». Selon Vias, les sourds et les malentendants sont tout aussi capables de conduire en toute sécurité que les autres conducteurs, et un marquage spécial est inutile, voire contre-productif.
Sécurité routière et inclusion
Le gouvernement argentin insiste toutefois sur l’importance de la sensibilisation à la circulation. Mariángeles Menéndez, directrice du bureau des permis de conduire de Buenos Aires, défend l’utilisation de l’autocollant comme un outil utile pour communiquer avec les conducteurs malentendants et indique que ses services font tout ce qui est en leur pouvoir pour les rendre facilement accessibles. Elle ajoute que cette mesure est essentielle car les conducteurs malentendants ne peuvent pas entendre les sirènes ou les klaxons, et que les signaux lumineux constituent une alternative plus sûre pour communiquer avec eux.
Par ailleurs, l’Argentine n’est pas le seul pays des États-Unis où cette question a fait l’objet d’un examen approfondi. Dans certains États américains, comme le Texas, les personnes malentendantes et sourdes sont invitées, mais pas obligées, comme en Europe, d’apposer une étiquette ou de porter une carte explicative dans leur poche en cas de contrôle de police. En tout état de cause, il n’est pas facile d’appliquer la loi à tous les cas de figure, car on ne peut pas simplement refuser à ce groupe d’usagers de la route le droit d’utiliser des voitures de location et de partage sans vignette.
L’ambiance n’est pas à l’introduction d’une mesure similaire dans les réglementations belges ou européennes. Pour l’instant, la solution argentine semble surtout refléter la recherche mondiale de moyens de promouvoir l’inclusion dans la circulation – comme cela a été le cas avec les feux de circulation sans distinction de sexe. La manière de le faire sans franchir les limites de la vie privée et de la discrimination reste un processus de délibération.
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