Les biocarburants européens menacés par les Chinois

Il n’y a pas que les constructeurs automobiles qui sont menacés par les Chinois. En effet, c’est aussi le cas des producteurs de biocarburants – en particulier le biodiesel – qui feraient aussi l’objet d’une concurrence déloyale. Mais avec quel impact ?

Publié le 16 juillet 2024
Temps de lecture : 5 min

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Les biocarburants européens menacés par les Chinois

Les conducteurs de voitures thermiques les utilisent tous les jours, même s’ils n’en ont pas conscience : les biocarburants – à ne pas confondre avec les carburants synthétiques ou e-fuels). Pour rappel, les biocarburants sont des carburants issus de la biomasse (huile de colza, blé, sucre…) et ils sont utilisés, car ils sont économiseurs de CO2 puisque tout au long de sa vie, la plante a absorbé le dioxyde de carbone. Cette utilisation permet donc de compenser en partie les émissions de nos véhicules. En Belgique, le Diesel vendu à la pompe contient maximum 7% de biodiesel (B7) tandis que c’est 10% pour l’essence (E10). Dans d’autres pays, c’est même plus, comme en France avec le bioéthanol qui monte jusqu’à 85% (E85).

Bien entendu, l’utilisation des biocarburants est vivement critiquée, car, après, tout on utilise une ressource agricole pour faire rouler les automobiles. C’est vrai. Ou plutôt, c’était vrai pour la première génération de biocarburants. Il existe en effet des biocarburants dits de génération avancée qui utilisent des ressources agricoles destinées au monde animal, ce qui n’empiète pas sur les besoins humains. Et ce n’est pas fini puisque, aujourd’hui, la deuxième génération de biocarburants est basée sur des déchets ou de la matière ligneuse (comme du bois), ce qui résout totalement le problème.

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Une concurrence chinoise

Mais, mauvaise nouvelle pour nos producteurs : ceux-ci doivent faire face à une concurrence depuis la Chine qui, si l’on en croit la fédération European Biodiesel Board (EBB), serait déloyale. La situation serait même tellement critique que de grands pétroliers renonceraient à de grands projets industriels en la matière. Ainsi, Shell vient de mettre sur « pause » un important investissement à Rotterdam qui aurait du produire 820.000 tonnes de biocarburants chaque année, à destination du secteur aérien, mais aussi pour le transport routier, le fameux Diesel HVO100 (deuxième génération) dont nous parlions récemment. Et la semaine dernière, c’est Chevron qui suspendait sa production de biodiesel à Oeding, en Allemagne. Et ce ne sont pas les seuls : Argent Energy, BP ou le spécialiste finlandais NESTE ont pris des décisions similaires.

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L’European Biodiesel Board (EBB) accuse la Chine de dumping et elle a saisi la Commission européenne pour que celle-ci lance une enquête sur les pratiques déloyales. Cette enquête doit d’ailleurs se terminer et, rebelote, si les accusations sont fondées, l’Europe pourra lever de nouveaux droits de douane sur les biocarburants chinois. Le problème, c’est évidemment que les Européens ne parviennent pas à produire leurs biocarburants à un prix aussi faible qu’en Chine. La Chine inonde donc le marché de biocarburants bon marché, faisant de ce fait chuter les prix… et la rentabilité des industriels européens. Et le problème, c’est que cette concurrence se concentre sur les biocarburants « premium », c’est-à-dire ceux de génération avancée et de deuxième génération. Et ce n’est pas qu’en raison du coût de la main-d’œuvre. En effet, les déchets sont plus nombreux en Asie, ce qui donne aussi un avantage sur les prix de la matière première. Mais les industriels accusent aussi la Chine de tricher sur les produits et d’indiquer qu’il s’agit de biocarburants de deuxième génération alors que ce n’est pas le cas. Il faudra vérifier.

Or, dans le cadre du Green Deal, l’Europe doit développer ses capacités en biocarburants et, c’est logique, ne pas aller les chercher de l’autre côté de la planète ce qui a un effet naturellement contre-productif. Mais la Chine grignote progressivement des parts de marché : l’Europe a produit 14,9 millions de tonnes de biodiesel en 2023, mais la Chine a déjà exporté 1,8 million de tonnes. Ce n’est pas rien et ça continue. L’industrie s’inquiète donc et estime que si l’Union ne fait rien, les producteurs européens pourraient ne pas terminer l’année, a-t-elle déclaré dans La Libre Belgique.

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La Belgique touchée ?

La Belgique possède plusieurs unités de production de biodiesel, notamment à Gand ou encore à Wanze, près de Huy (bioéthanol). Ces usines ne sont pour l’heure pas menacées, mais essentiellement parce qu’elles ne produisent pas encore de biocarburants de deuxième génération (100.000 tonnes seulement sur 600.000 tonnes produites). Mais ça n’empêche pas les industriels de se montrer inquiets et d’attendre l’Europe pour la levée de taxe.

Les biocarburants représentent une opportunité dans la transition énergétique, tout simplement parce qu’il s’agit d’un moyen supplémentaire pour réduire rapidement les émissions de CO2. Laisser cette filière partir à l’étranger serait donc une perte, à la fois pour les emplois, en matière d’expertise, mais aussi un non-sens écologique. Selon la Brafco interrogée récemment (la fédération des négociants en carburants), la production de biocarburants serait suffisante en Europe pour couvrir tout le secteur des transports fonctionnant au Diesel (HVO100). Ce serait dommage de ne pas utiliser ce levier.

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Par David Leclercq Rédacteur automobile

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