Dimanche dernier, le groupe Stellantis annonçait avoir « accepté la démission de Carlos Tavares avec effet immédiat ». Laconique, le communiqué publié laisse la porte ouverte à toute une série d’interprétations autour des raisons de cette séparation. Mais ces manœuvres de communicants ne durent en général pas très longtemps et, déjà, les langues se délient quant aux véritables raisons du départ du dirigeant.
Le fait est que la situation semble avoir changé dans un laps de temps particulièrement court puisqu’il y a un mois encore, le Conseil d’administration de Stellantis accordait encore son soutien inconditionnel à Carlos Tavares. Alors, qu’est-ce qui a changé ?
Un conflit
Il faut se souvenir que le communiqué indique un manque d’alignement entre les ambitions du PDG et du Conseil d’administration. Et c’est bien évidemment là qu’il faut chercher. Comme l’a déclaré une source à nos confrères d’Automotive News Europe, il apparaît que Conseil en a eu assez des objectifs agressifs en matière de ventes, des réductions des coûts et des relations conflictuelles avec les fournisseurs, les concessionnaires et les syndicats. En clair, la politique dure de Tavares aurait lassé.
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Si Carlos Tavares n’a répondu à aucune sollicitation de la part de la presse, certaines personnes proches du dossier ont expliqué que les ambitions du dirigeant prévues pour les 15 prochains mois – soit juste avant sa fin de carrière – n’auraient absolument pas plu. En particulier, certaines questions tactiques sur la manière de gérer l’entreprise ont crispé les membres du Conseil. A priori, la stratégie mise en place par Tavares semblait encore se durcir alors que les contestations ne cessaient de prendre de l’ampleur. Le Conseil aurait donc décidé de travailler à rétablir la confiance (notamment avec les fournisseurs et de réseau de distribution) plutôt que de continuer à privilégier le bras de fer avec ceux-ci. En clair : le Conseil d’administration a décidé de mettre un terme à la ligne radicale privilégiée par Tavares. Pourquoi ? Parce qu’elle a probablement atteint ses limites et qu’elle ne rapporte plus (aux actionnaires).
Aussi une affaire de gros sous
Mais il n’y a pas que la ligne dure adoptée par Tavares qui aurait énervé le Conseil. Sa rémunération astronomique – la plus importante du secteur – aurait aussi posé problème. Rappelons que l’homme a gagné 36,5 millions d’euros pour l’année 2023 et qu’au dernier salon de Paris, il fustigeait la direction américaine du groupe pour ses piètres résultats. Un peu facile alors qu’il n’y a finalement qu’un seul capitaine à la barre.
Il apparaît qu’au mois de novembre, la tension est montée d’un cran encore, rendant la collaboration impossible avec de gros actionnaires comme l’État français ou la famille Peugeot (Exor), a encore précisé une autre source. Pire : lorsque le Conseil d’administration aurait demandé à Tavares des explications sur sa stratégie, celui-ci aurait sèchement répondu de ne pas se mêler de son travail et que ce n’était pas les affaires du Conseil. Une ligne rouge a donc été franchie.
Un redressement ?
En réalité, le Conseil d’administration aurait laissé trop de latitude à Carlos Tavares. Par exemple, les problèmes relatifs aux approvisionnements et aux conflits avec les concessionnaires (américains surtout) auraient du être résolus il y a un an déjà, lorsque le groupe réalisait encore de gros bénéfices.
Autre paramètre : Carlos Tavares avait décidé d’éviter les surtaxes européennes sur les voitures thermiques en forçant encore un peu plus la marche vers la voiture électrique. Ce qui a suscité aussi les peurs des administrateurs qui ne voulaient pas voir disparaître trop rapidement les voitures thermiques dans le climat d’incertitude. Tavares voulait imposer des quotas importants de production de voitures électriques (passer de 12 à 21%), ce qui n’a pas plu au Conseil. Avait-il raison ou tort ? Difficile à dire et seul l’avenir le dira. Ce qui est sûr en revanche, c’est que Carlos Tavares a toujours été un PDG à la dure et craint par ses équipes. Si ce modèle s’est avéré performant pendant un certain temps, il a aussi atteint ses limites. Tout comme sa volonté à toujours plus réduire les coûts (mais à augmenter son salaire) qui, selon plusieurs sources, étaient pourtant comprimés à leur maximum.
Si on ne remet pas en cause les capacités de Carlos Tavares, il apparaît que l’homme aurait finalement adopté une posture qu’il dénonçait pourtant haut et fort : le dogmatisme. Insensible aux critiques, enfermés dans sa pensée unique, voilà finalement ce qui aura provoqué sa chute...
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